mon_prem.gif (1537 octets)      Le Premier       mon_prem.gif (1537 octets)

Age :  inconnu Profession :  Shugenja (?) Caste : inconnue Rang : inconnu Métier : inconnu
Niveau : inconnu XP : inconnus ON : inconnu PdV : inconnus CA : inconnue

"... Nous vous exterminerons maudits humains ... Aargh ! ..."
Les cris de rage roulaient comme des coups de tonnerre répercutés à l'infini par les parois de la grotte. Cela faisait plusieurs heures déjà que les humains, moines et magiciens luttaient pied à pied avec les monstres. La bataille avait tourné à l'avantage de ces derniers, les Sutras donnés par Bouddha faisaient merveille. Les "démons" disparaissaient les uns après les autres dans le "trou" créé par les incantations. Finalement le dernier, le plus puissant, était poussé contre sa volonté vers ce néant

"... Je reviendrai, je récupèrerai ce que vous m'avez pris, je vous détruirai tous, jusqu'au dernier, et Bouddha ne pourra rien pour vous misérables larves. JE REVIENDRAI  ET  JE  SERAI  LE  PREMIER ..." Les paroles du dernier "démon" disparurent avec lui dans un nuage de fumée noire. Puis le calme envahit la grotte, seules les dernières incantations et prières venaient troubler le silence.

- Pensez-vous qu'ils reviendront Shinkatsu Sama ?
- Nous prierons pour cela ne soit pas, tant que nous aurons la foi nous ne risquerons rien !
- Mais ce dernier démon était persuadé de revenir, comment cela se pourrait-il Senseï ? Qui étaient-ils ?
- N'aie pas peur, Hirondelle Joyeuse, ce dernier démon ne sera jamais le Premier à revenir, nous supprimerons toute trace de son passage sur cette terre, images, temples, châteaux, rien ne subsistera d'eux : nous les effacerons de la mémoire des hommes ! Sans support de ce côté-ci , comment pourrait-il revenir? On ne franchit pas un abîme avec un pont construit d'un seul côté ! Quant à ce qu'il était, mieux ne vaut pas le découvrir, pour la paix de nos âmes ! Va ! Et commence ton travail, la paix de ce monde en dépend !
- Puisse Bouddha nous soutenir dans notre entreprise !

Province de Teda, huit siècles plus tard, un village près d'une forêt :
- Viens, allons voir la vieille Shugenja, et elle nous dira si nous aurons de bonnes récoltes cette année !
- Femme, il y a d'autres manières pour ne pas gaspiller notre argent.
- Allez viens, et on saura !

L'intérieur, sombre, d'une maison à l'écart du village, éclairé seulement par un feu alimenté par un jeune enfant. Les deux paysans regardent avec anxiété la vieille Shugenja en pleine méditation. Le visage de la vieille, qui jusqu'à présent était serein, devient tout à coup crispé, reflétant l'horreur qu'elle est seule à voir. Sa respiration devient oppressée, son corps est agité par des tremblements incoercibles. Soudain elle sort  de sa transe !
- Notre année va être si mauvaise que vous en tremblez encore ?
- Elle sera pire encore, et pour tout le monde, si ce que je crains est avéré !
Sur ces paroles, la vieille Shugenja s'extirpe de sa position inconfortable et se dirige vers un petit coffre, qui parait très ancien. Elle en sort un vieux parchemin, qui semble prêt à tomber en poussière à tout moment. Fébrilement elle parcourt le texte, son visage pâlit sous l'effet de cette lecture. Elle porte la main à son front et s'appuie sur le mur pour reprendre ses esprits.
- Le malheur est sur nous : LE PREMIER est de retour !

Le soleil est haut, l'air sec, il fait chaud, rien d'extraordinaire pour la saison. Les arbres sont immobiles, pas le moindre souffle d'air. Sur le chemin la vieille shugenja se hâte, sa robe soulève la poussière, des gouttes de sueur perlent sur son front. Sa marche énergique prouve, s'il le fallait, sa détermination, elle doit atteindre le monastère au plus vite.

Le toit de la bâtisse se découpe sur le ciel au sommet de la colline, plantée aux milieu des arbres. Elle arrive enfin au pied de l'escalier qui mène au temple : là se trouve celui qui lui expliquera sa vision.

- Plus que cet escalier et je trouverai la paix ou l'angoisse !

La montée est pénible, mais elle la conduit jusqu'à la porte du monastère.

- Prenez une tasse de thé, reposez vous un moment, votre vieux corps fatigué n'est plus fait pour ces longs trajets ! L'homme qui vient de parler semble sans âge, son visage reflète la sagesse de celui qui est parvenu au satori. Son sourire engage la shugenja à faire ce qu'il propose.
- domo arigatoo gozaïmas ! dit-elle dans un souffle, elle poursuit : ce qui m'amène ici ne souffre aucun délai ! J'ai eu une vision qui me fait craindre le pire ! "
- Calmez-vous et racontez ce que vous avez vu.
La shugenja fixe le vieux moine assis en face d'elle, elle commence son récit ...

L'homme s'avance péniblement dans la forêt, son chemin à peine éclairé par la clarté argentée de la lune. Il est silencieux, c'est à peine si on entend les brindilles craquer sous son pied et le bruissement des feuilles qu'il écarte.
Il s'arrête, devant lui, au milieu de la clairière se dresse un tumulus, crevé par une ouverture encadrée par des bambous supportant des bandelettes croisées. De cette ouverture sort une odeur fétide. L'homme a un haut-le-cœur, décidément il ne s'habituera jamais à cette puanteur. C'est la première défense contre les curieux, se dit-il, la seconde est quand même plus efficace. Il allume la lampe qu'il portait à la main, et pénètre dans la grotte. Devant lui le sol se met à bouger, des éclairs roux et verts lui renvoient la lumière de sa lampe: un tapis d'insectes dont la plus petite morsure vous donne des fièvres qui vous clouent au lit pendant toute une lunaison. Une poignée de ces "gardiens" est aussi mortelle que le plus venimeux des serpents. Il entonne une incantation, le tapis s'écarte devant lui, découvrant des ossements et des charognes : des cadavres de chiens qu'il leur a obligeamment fourni en échange de leur protection.
Il s'avance dans le tunnel, jusqu'à une salle à la décoration macabre. Là, la puanteur est à son paroxysme, des têtes de chiens décomposées suintent de gras et de sang, visiblement enterrés vivants, un bol de nourriture juste hors d'atteinte pour ajouter au supplice. La grotte sue la rage, l'impuissance, la haine et la douleur, si fort que l'homme titube sous l'assaut de ces émotions violentes, presque palpables. Curieusement pas un seul insecte ne se risque dans la salle. Au centre se trouve un autel couvert d'inscriptions dans une langue inconnue, sur un trépied trône une sphère sculptée encerclée par des coupes au contenu indescriptible.
L'homme s'approche de l'autel, sort une fiole de sa ceinture. Il contemple le contenu à la lumière de sa lampe comme le ferait un amateur de grands crus. Les reflets du liquide sirupeux feraient craindre le pire à toutes les mères de Shinkatsu.
-Qu'importent ces vies sans valeur, leur seul intérêt c'est de faire revivre le Maître ! A peine a t-il prononcé ces paroles qu'il a déjà tranché la corde retenant le cadavre d'un chat suspendu au plafond. La bête tombe dans un bruit sourd, les os se brisent en mille morceaux dans un giclement d'intestins et d'humeurs putrides.
Il ferme les yeux, entamant un rituel longuement répété, héritage séculaire du clan.
- Abira unkensowaka... onmidare yasowaka...
En même temps il allume les bougies noires aux quatre coins de l'autel. Les flammes s'élèvent vacillantes. Il recueille les entrailles glissantes du chat à pleines mains et les met dans une coupe devant la sphère.
- On, kirikuhitsuchirihiki, tadanouuso, satasoba yasokawa... récite t-il d'une voix puissante. Dans un large mouvement de la main il plante un couteau dans le crâne du cadavre, un craquement d'os brisé, le crâne éclate sous le coup, projetant une masse gélatineuse sur l'homme. Le contenu du crâne est mélangé dans une nouvelle coupe avec celui de la fiole.
- Tadanouun, satasovaya, satasoba yasowaka, on, kirikuhikirisowaka... Les incantations succèdent aux manipulations mêlant sangs, graisses et autres ingrédients horribles. L'atmosphère de la grotte devient insupportable, ces pratiques contre nature révoltent son corps : des larmes, des nausées, des tremblements. Il tiendra bon ! Son futur pouvoir en dépend, la vengeance de son clan est au bout.
Les inscriptions deviennent iridescentes, la sphère se met à vibrer, doucement d'abord, mais maintenant un bourdonnement l'accompagne. De la fumée s'écoule lentement du sommet de la sphère vers les coupes disposées en cercle, des rayons de lumière verte s'échappent de ses sculptures pour s'écraser sur les parois de la grotte, leurs pulsations donnent un semblant de vie à la pierre inanimée.
Le visage de l'homme ruisselle, les yeux sont injectés de sang, les veines de son cou gonflées, à deux doigts d'éclater, on voit distinctement les pulsations de son coeur, à l'unisson avec la sphère. Malgré la douleur la litanie continue à sortir de sa bouche tordue, chaque mot émis est une victoire qui le rapproche du but ultime.
La fumée est de plus en plus épaisse et semble animée d'une vie propre. La masse fuligineuse s'écoule maintenant de l'autel et tombe en lourdes cascades vers le sol, les volutes noires contournent les charognes, dansent autour et les engloutissent. Le bourdonnement se fait de plus en plus aigu. Du sang s'écoule des yeux de l'homme, des bulles rouges éclatent sur ses lèvres au rythme de sa respiration, un liquide noirâtre suinte de ses oreilles et de ses narines, un spasme violent convulse son corps, tendu comme un arc prêt à rompre. Un craquement, puis le corps sans vie de l'homme retombe sur l'autel, bousculant la sphère. Elle emporte les derniers espoirs de conquête avec elle, renversant les coupes pour finalement se briser sur le sol. La fumée semble se concentrer autour des débris, misérable tentative pour réunir ce qui n'est plus, terminer le rituel inachevé. Cette agitation, seule trace de "vie" visible dans la grotte se fait de plus en plus frénétique. Le spectacle est effrayant, tant de rage et de violence dans le silence le plus absolu. Lentement la fumée sort de la grotte et la légère brise de la nuit disperse les volutes maléfiques.

-Ma chère amie, je crois que nous avons un problème ! Il faut en référer à Petit Singe, je me mets en route sans plus attendre !

- Quel imbécile ! Avoir construit une porte inter dimensionnelle avec des moyens aussi ridicules ! Je hais les humains et leur incompétence ! Qu'espérait-il ? Lever une armée de démons ? Je n'ai même pas pu transférer mon enveloppe physique, et mon corps éthéré est incomplet ! Bah ! Avec le temps il se régénèrera !
Première leçon : les humains sont faibles et non fiables !
Deuxième leçon : ne pas utiliser de porte bricolée par eux, mais bâtie par moi !

Maintenant que je suis sur ce plan voyons un peu ce que nous apporte ce monde !


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